Les sans barreaux et les mal barrés

Attention rentrée ! Les écrivains rentrent bientôt de vacances, il va pleuvoir des chefs-d’œuvre à la pelle ! Avant, avec un peu d’avance, il va y avoir le fameux cartable scolaire : les médias vont encourager les troupeaux à se jeter dans les rayons du super en août pour éviter la ruée du troupeau en septembre ! Sans doute que des troupeaux en tongs, ça rend la ruée plus estivale que des troupeaux habillés pour l’hiver. Bon, revenons à la rentrée littéraire : sûrement un Amélie Nothomb, un bête c’est l’heure sinon rien ! Enfin tous ceux de l’année dernière, avec de nouvelles couvertures (la couverture des médias, elle, ne changera pas). C’est vrai, qu’il y a de moins en moins de lecteurs, aussi je me demande si la production de livres en France ne fonctionne pas comme celle des journaux, c’est-à-dire que les subventions leur permettent de se passer de lecteurs. Bien entendu, les subventions ne tombent que sous certaines conditions. Conditions qui font qu’il vous suffit de lire un seul livre, un seul journal de la place publique, pour se faire une idée de tous les autres puisqu’un même char les lie. Pour les bouquins, il y a toute la faune des petites mains, elle représenterait la caution des belles lettres, voire, et là ne riez pas, elle serait l’expression du caractère rebelle, de l’antisystème ! Étonnant alors, de constater à travers ces productions, que les crachats partent dans la même direction que ceux balancés par le pouvoir en place ! Feuilletez leurs catalogues, lisez leurs pontes, vous vous apercevrez que leurs auteurs, peu payés, mal connus, sont pourtant la copie conforme de ceux déclarés d’intérêt public. La différence essentielle entre l’inventaire des pignons sur rue et celui des pignoles sur ruelle, c’est que dans la soupe de ces derniers, on ne débusque ni stars ni des tueurs en série, ceux-là prennent trop cher, pas d’autre raison hélas. Tout de même, une note d’espoir dans ce fatras, avec les quelques insoumis qui ont les reins assez solides pour supporter les procès en série, une censure qui ne porte pas son nom, et, malheureusement aussi, la vindicte populaire qui s’abat sur leurs épaules car, et c’est une constante au fil de l’histoire, jamais un combat qui vaut la peine d’être mené n’a, en son temps, reçu l’assentiment des majorités, jamais. Un ministère de la culture et toutes ses tantes louloutes, ont suffi à générer et à imposer de faux artistes pour remplacer avantageusement l’inculture et l’ignorance ; ils cultivent les gens comme ils leurs apprennent le goût de la liberté dans des prisons sans barreaux. Les vrais artistes, eux, sont mal barrés, si mal barrés que depuis des siècles, toujours quelques vers remuent dans leur terreau ; comme le grain de poussière dans la machine.


Fabrice Marzuolo