On
croit savoir où se situe le Ponant. Mais le Polvan ? Non, ce n’est pas
un pôle (ou alors le pôle Sud), ni même un vent (le mistral pourrait
faire l’affaire). Non, le Polvan est une langue haute, noble, splendide,
émaillé de camées et d’émaux comme dirait Théophile, qui à la fois sent
la garrigue, nous plonge dans l’ombre d’une gorge, nous montre un ciel
semé d’étoiles où logent les poètes, ces vagabonds aux cœurs et aux
semelles de vent. La Grand Ourse nous regarde. Nous avançons sur le
grand Chemin de la vie pareil au Bateau ivre. On rit — car Polvan
n’oublie pas qu’il faut être léger ; on s’émeut, laissant choir son
menton, pensant que le soleil est bien trop chaud pour entamer sa
promenade. L’anisette n’est pas loin. Et on reprend ces discursives Missives
en écoutant vrombir le taon. Un lézard passe, traversant la tonnelle.
Quand on est bon lecteur, on comprend vite que notre auteur a bu aux
rondes mamelles surréalistes mais ce serait ranger ce franc-tireur sous
une bannière qui ne peut être que réductrice. Le visiteur si attentif de
Malrieu est un poète à la prose charnelle, envoûtante, goûteuse, pleine
de pleins et de déliés, tranquille, mimant la joie quand il s’agit de
gravité, qui porte son lecteur vers des territoires collineux où errent
les âmes de Char, Apollinaire, Breton, Soupault, Desnos et quelques
autres... Terres d’élection qui exigent la rigueur de l’amour comme la
faiblesse de l’amitié, la lame des déconvenues, la gouge de l’espoir.
Dans ces lettres malicieuses, adressées à un « tu » que l’on sent proche
du poète (et qui n’est peut-être que lui-même ou un autre poète),
s’inventent des métamorphoses au creux de chaque ligne. Henri-Michel
Polvan est magicien du verbe et il sait bien que ses Missives ne sont
pas aussi minces qu’il paraît le prétendre, même si elles parodient
parfois Les lettres de mon moulin.
Notre Midi est là, solaire, avec un ciel vibrant, débarrassé des
lucioles de la nuit où s’ébroue le passage du Temps, traînant dans son
sillage des pépites de sens d’où naît la poésie, cette tension entre
deux paroxysmes : la Mort et la Beauté. La Mort, n’en parlons pas ou en
couplets diaphanes. Parlons de la beauté qui parcourt ces Missives du vent, cousus de mots diaprés, ô combien délicats, piochés dans la besace des Illuminations.