Jacques Lucchesi est l’auteur d’une trentaine
d’opus ─ poésie, nouvelles, essais ─ que, omission ou modestie, il ne
récapitule pas. La première de ces
douze nouvelles, celle que pour ma part je préfère, évoque un
village provençal qui non seulement connaît la douceur de vivre mais
semble avoir écarté la mort. Par touches subtiles et glissements
successifs, sans guère de réalisme, le nouvelliste nous transporte
« aux alentours du paradis », ce qui atteint en moi et certainement
aussi chez beaucoup de lecteurs une corde sensible
non moins que secrète, la nostalgie d’un paradis perdu. Quoi qu’il
en soit, le charme opère et il réussit à nous faire entrer dans son
rêve.
Plusieurs nouvelles relèvent d’un tout autre
registre. Ainsi, « Celui qui te précédait », se passe en 2032 : un vieil
homme
s’offre un voyage dans le temps qui lui permet de dialoguer
réellement avec l’adolescent qu’il était. Celui-ci s’interroge sur
l’homme qu’il sera, occasion d’une réflexion ontologique sur
l’avenir. Si l’aspect technico-scientifique de la S.F était
développé, je me serais personnellement ennuyé ; ce n’est heureusement
pas le cas. Le recueil aborde souvent aussi la satire
sociale, je me demande même si elle n’est pas omniprésente.
« Télé-réalité » présente une émission de télévision révolutionnaire
puisque le vainqueur de la tombola recevra comme lot une
nuit d’amour avec l’animatrice ! Humour, noir cette fois, avec un
supermarché funéraire et multiconfessionnel qui connaît le plus grand
succès ; hélas, il doit bientôt fermer en raison
du… décès du patron. (« Saison de soldes ») L’air de rien, l’auteur
sait manier le stylet et le pistolet !On ne s’ennuie pas un instant à la
lecture de ce recueil inventif, varié et
bourré d’humour.
Editions édilivre, collection Tremplin. 2011. 12, 5 euros.
Jean BENSIMON